
Castres : Les chemins de Compostelle, quête de soi ou quête de foi
Compostelle située à l’extrémité de la péninsule ibérique, représente au même titre que Rome ou Jérusalem, un véritable appel pour tous les habitants de l’Europe entière ; il s’agit pour les pèlerins modernes comme pour ceux du Moyen-Age de se mettre en route vers un au-delà, vers un ultreïa ; on dépasse le petit horizon de son lopin de terre pour aller vers cette terre inconnue, pour affronter défis et surprises du chemin compostellan, vers cette fin de terre (Finis Terrae) qui débouche sur l’infini. Olivier Cèbe, invité par Marie-Claude Ramirez et l’association Le salon du Costume Historique, a disserté de façon savante et passionnante sur « ce périple à suivre ou plutôt à arpenter au fil de cet immense livre dont la lecture se déroule sur les Chemins de Saint-Jacques. Une invitation aussi à regarder les étoiles qui illuminent le chemin de chacun ».
Un itinéraire ancré dans l’histoire
Le classement en 1998 des Chemins de St Jacques comme bien relevant du patrimoine mondial de l’Unesco a permis de reconnaître la valeur universelle exceptionnelle de ce tracé avec les monuments qui le jalonnent. « Tout au long du Moyen Âge, Saint Jacques de Compostelle fut une destination majeure pour d’innombrables pèlerins de toute l’Europe. Pour atteindre l’Espagne, les pèlerins traversaient la France. Quatre voies symboliques, partant de Paris, de Vézelay, du Puy et d’Arles et menant à la traversée des Pyrénées résument les itinéraires innombrables empruntés par les voyageurs. Églises de pèlerinage ou simples sanctuaires, hôpitaux, ponts, croix de chemin jalonnent ces voies et témoignent des aspects spirituels et matériels du pèlerinage. Exercice spirituel et manifestation de la foi, le pèlerinage a aussi touché le monde profane en jouant un rôle décisif dans la naissance et la circulation des idées et des arts ».
Camino françes ou Chemin cantabrique ?
L’option qui s’offre au pèlerin sortant du « caillou », de la muraille pyrénéenne est double : soit emprunter le Camino francès par Punto la Reina, Burgos et remonter vers Compostelle, soit suivre au nord le parcours du Chemin cantabrique qui longe la côte de l’Océan Atlantique.
Une quête de soi ou une quête de foi ?
Olivier Cèbe qui a représenté la France pour la reconnaissance européenne et mondiale de ce patrimoine Unesco, a évoqué l’histoire de ce chemin avec notamment l’épopée de Charlemagne et de la chanson de geste de Roland de Roncevaux. Ce fameux Roland qui avec son épée Durandal ouvrit la brèche qui porte son nom au cirque de Gavarnie. Ce même Roland qui lance son épée, captée par un archange et qui va se ficher dans le rocher de Rocamadour. Enormément d’anecdotes et de précisions ont émaillé cette conférence : les pèlerins munis de leur bourdon entament avec leurs deux pieds la marche trinitaire : pied droit, pied gauche et pose du bourdon ; la Trinité est évoquée. Les riverains hospitaliers ouvrent leur maison à ceux qui sont sur le chemin ; les pèlerins nantis de leur crédencial, arrivent en silence et repartent, chargés des vœux qui leur sont confiés. La marche du pèlerin se fait de plus en plus céleste ; depuis le Monte del Gozo, il aperçoit là-bas les flèches de la cathédrale de Santiago : « Compostelle, l’éminente ville de l’Apôtre, pleine de toutes sortes de charmes, la ville qui protège les restes mortels de saint Jacques, raison pour laquelle elle est considérée comme l’une des plus heureuses et éminentes des villes d’Espagne », comme en témoigne Aimery Picaud dans son guide du Pèlerin.
Pierre-Jean Arnaud
