Cinéfeuille : rando paysagère de Donnazac à Senouillac
Comme les autres années, la randonnée paysagère organisée par le département et le CPIE dans le cadre du festival Cinéfeuille, a déroulé son ruban humain joyeux et coloré en ce mercredi 25 mai 2016, dans les coteaux tarnais. Cette année, ses promoteurs avaient choisi un itinéraire intitulé « De vignobles en châteaux, un voyage dans le temps ». Tout au long du parcours, les randonneurs ont pu ainsi apercevoir ou visiter édifices, églises ou châteaux tout au long du périple qui les a conduits de Donnazac à Senouillac, en écoutant les explications éclairées d’Adeline Béa, historienne de l’art et de Mélanie, stagiaire du CPIE.
L’église de Donnazac, dédiée à saint Jacques
Malgré des prévisions plutôt pessimistes de la veille, un soleil radieux a accompagné les marcheurs dans leur périple vert intelligent. La première étape à la descente du car était le village de Donnazac, située à proximité de Cahuzac-sur-Vère. Sa petite église construite après la guerre de Cent ans, date du XVIe siècle. Plusieurs éléments sont inscrits aux Monuments historiques : deux tableaux et une statue en bois dorée de l’apôtre saint Jacques, incluse dans la nef et qui a été placée derrière une grille métallique pour raison de sécurité. Cette église offre une curiosité en ses deux sculptures primitives en cul de lampe qui portent témoignage de la culture de la vigne dans le Gaillacois ; l’un représente la tête d’un vigneron portant le cabezal, sorte de chapeau adapté pour le transport des comportes de raisin et l’autre un vigneron avec la serpe, la poda, qui permet à la fois de tailler et d’élaguer la vigne et de couper les grappes de raisin. L’église a gardé son mobilier liturgique et on peut encore admirer sur la voûte les peintures exécutées par l’italien Morelli qui a aussi œuvré dans plusieurs églises du Tarn comme Brens ou Labruguière ; ces peintures symboliques étaient censées représenter la Jérusalem céleste, avec des figures de saints ou de prophètes.
Découverte d’une zone humide
Au détour d’un chemin après avoir parcouru quelques hectomètres, voici que se présente une zone humide ; c’est une mare temporaire où prolifèrent amphibiens et plantes aquaphiles. Parmi les amphibiens, voici le triton à queue plate, la salamandre à queue ronde, le crapaud calamite reconnaissable à sa ligne marquée sur le dos. Savez-vous que les crapauds peuvent parcourir jusqu’à kilomètres pour se reproduire ? Les têtards seront autonomes au bout de 4 ou 5 mois ; suffisamment grands, ils vont pouvoir ainsi quitter la mare asséchée à la période estivale et gagner des lieux humides dans les bois.
La polyculture pour minimiser les effets des catastrophes naturelles ; la cabane de vigne
Jusqu’à un passé récent, l’habitat rural était représenté par quelques grands châteaux et grandes demeures et aussi par des unités d’exploitation plus modestes, des fermes constituées par une petite maison avec un chai, un cheval, un grenier. La polyculture- céréales, fèves, lentilles, vigne- est ainsi pratiquée pour faire face aux aléas climatiques et minimiser les effets de ces catastrophes naturelles sur les récoltes. Une citerne permet la récupération de l’eau de pluie pour boisson et traitement des vignes. Quand les cultures sont trop éloignées de l’habitation principale, on construit une cabane de vigne appelée aussi entajou, voir le nom Lentajou sur Gaillac, pour stocker des outils.
Arzac, conservatoire végétal
Dans le hameau d’Arzac, on trouve un certain nombre de plantes dans une partie enherbée près de l’église : d’après la théorie des signatures, la plante qui ressemble le plus à un organe du corps est réputée soigner cet organe. Ainsi la noix soignerait les affections du cerveau… La prêle, qui ressemble à la colonne vertébrale serait efficace contre le mal de dos. Le plantin qui est filamenteux servirait à recoudre, il était utilisé par les pèlerins pour soigner les ampoules des pieds. Le coquelicot aurait des vertus apaisantes. l’infusion de fleurs de bouillon blanc guérirait les bronches encombrées, soignerait la toux.
A Granejouls, Yves Deleu, un restaurateur perspicace
Yves Deleu est un restaurateur perspicace et enthousiaste Celui qui préside aux destinées de l’Asocciation de Cahuzac sur Vère Au fil du temps, a pris en main depuis 10 ans la restauration de l’église de Granejouls, qui était très endommagée. Il précise que ce village a pu être daté grâce à la découverte de monnaies remontant à l’empire romain. Dans une villa gallo-romaine ornée de superbes mosaïques, ont été retrouvées des monnaies de Caligula qui a régné dans les années 40 de notre ère et des monnaies du général romanisé Postume qui se fit proclamer empereur face à Gallien entre 260 et 269. a cet endroit, étaient réunies les trois conditions nécessaires pour la construction d’une église : l’orientation à l’est du bâtiment, la présence de deux fontaines et celle d’une nécropole antique. L’autel et les chandeliers sont classés ; ils avaient été commandés par le prêtre qui au XVII siècle avait été curé et qui est enterré dans l’église. On constate l’existence de deux chaires : une pour prêcher et une chaire curiale où se tenait le prêtre durant les offices. On découvre aussi la présence d’une niche avec placard eucharistique. L’église est consacrée à saint Jean-Baptiste dont la statue a servi de modèle pour le St Jean de Gaillac.
Une escale pique-nique au domaine des Cahus
L’heure de midi était déjà atteinte et la faim commençait à se faire sentir quand le groupe des randonneurs est parvenu au lieu-dit Laubarel, dans le domaine des Cahus. Les propriétaires Laurent et Corinne Cadars ont accueilli les marcheurs dans le chai de leur domaine. Pratiquant la culture raisonnée, le couple cultive ses 10 hectares de vigne en respectant la charte des Vignerons indépendants. A base des cépages syrah, braucol et duras, ils produisent des rouge tradition et fût de chêne ; le mauzac permet d’obtenir du blanc doux alors que le blanc sec provient de L’en de lel et mauzac. Pour avoir les 7 vins du Gaillac, il faut ajouter le rosé, la méthode e ancestrale et le brut rosé. Les deux jeunes propriétaires produisent aussi du jus de raisin.
Les trois châteaux : Salettes, Mauriac et La Bounette
Le temps de refaire ses forces et c’est le départ en direction des 3 châteaux dont la vue agrémente le parcours des marcheurs. Du château de Salettes avec ses soleilhous où habita la famille Hautpoul, on arrive ensuite au château de Mauriac, où résidaient les Rabastens. Avant de parvenir à ce grand château des XV et XVI emes siècles, superbement restauré et propriété de Bernard Bistes, on passe à côté d’un jardin de plantes tinctoriales avec le fameux pastel, dont les boules macérées firent de ce territoire le pays de Cocagne. Le Château de Bounette a vu passer la famille de Foll, les Paulo, les Cayol ; on y entend encore les paons. Arrivés au terme du voyage à Senouillac, on va admirer les maisons à pans de bois ou en pierre avec une vue dominante sur tous les vignobles des alentours.
Pierre-Jean Arnaud