En Calcat: F.Emmanuel après F.David

Eglise : Père Emmanuel, 9e abbé d’En Calcat

Qui êtes-vous ? Je suis frère Emmanuel, originaire de Bordeaux. J’ai toujours vécu dans la ville, et pour moi, rentrer à En-Calcat a été la découverte plutôt du monde de la campagne, de la nature. Avant d’arriver ici, j’étais étudiant en physique-chimie, à l’université de Bordeaux, avec une vie paroissiale riche et belle, qui m’a permis de connaître En-Calcat, et je rends grâce de cela.

 Comment est née votre vocation ? Aussi loin que je me souvienne, quand j’étais petit, je voulais être prêtre. Vers l’âge de 17 ans, c’était devenu clair, qu’être prêtre diocésain, en tout cas comme je les voyais, c’était non, mais que la vie monastique, c’était oui. Un évènement particulier m’a fortement marqué : un frère venait de présider l’eucharistie et je le retrouvais quelques minutes après, au potager, en train de racler la terre. Pour moi, c’était un choc ! Je voulais être comme ce frère : pouvoir prier, pouvoir travailler, dans un même lieu, comme une unité de vie. Pour moi, cela apparaissait comme un appel !

Quelle parole de la Bible vous touche plus particulièrement ? La question des paroles de la Bible qui « touchent » est une question un peu piège. Je crois qu’il y a quelques années, j’aurais répondu en disant : « il y a tel ou tel passage ». Aujourd’hui, franchement, je ne sais pas bien ! Notre travail de moines, c’est d’accueillir la Parole de Dieu dans sa totalité, comme étant Parole révélée qui me parle aujourd’hui parce qu’elle m’est donnée. Tout récemment – c’était au moment de l’élection abbatiale – j’étais, dans ma lectio divina, dans l’évangile selon saint Luc, au chapitre 19. C’est la rencontre de Jésus avec Zachée. C’est vrai que ce texte de l’évangile a été un peu comme une parole pour moi parce que j’étais bien, dans mon sycomore, à regarder les choses d’un peu haut.

 Quelle sont les difficultés et les joies de la vie monastique et communautaire ? Difficultés et joies de la vie monastique, comme les difficultés et les joies de la vie de tout homme. Il y a quelque chose dans notre vie monastique qui est hyperréaliste, profondément réaliste. Nous avons, ici, une vie de famille.

Qui est le « Père Abbé » pour sa communauté, et quel est son rôle ? Son nom dit ce qu’il est : Père Abbé. On le dit deux fois même : il est père, et il est « abba » – « abba », ça veut dire : « papa ». Je ne suis pas le papa de mes frères, il ne faut pas exagérer, et puis, la majorité des frères est plus âgée que moi ! Mais il y a une forme de paternité, c’est-à-dire d’engendrement, qui est le rôle de l’abbé pour que le frère devienne vraiment lui-même. Je crois que le rôle du père, ce n’est pas exactement le rôle de la mère, et que ce nom est bien choisi, en fait. Le père, c’est celui qui tape sur l’épaule de son fils et qui lui dit : « vas-y, je serai toujours là ! ». Ce n’est pas tant le consolateur – ça c’est plutôt la mère – que celui qui dit : « allez, vas-y, fonce, je suis là ! ».

En quoi la Règle de saint Benoît est encore d’actualité ? La Règle de saint Benoît, c’est le VIe siècle, donc ça remonte loin! Mais c’est vrai qu’elle a toujours été actuelle. C’est quand même un petit miracle de ce texte de l’antiquité tardive, avant le Moyen-âge. Il y a quelque chose qui est une belle parole pour notre monde contemporain qui cherche tellement une efficacité dans les propositions diverses. Là, on trouve une efficacité, je crois, bien plus profonde, mais sans une proposition offensive. La proposition est plutôt accueillante. Ça, c’est une véritable actualité de la Règle.

Que diriez-vous à un jeune homme qui se pose la question de la vie monastique ? Ce que je viens de dire, en fait : « Viens, et vois », qui est la parole de Jésus dans l’évangile selon saint Jean (Jn 1, 39.46). « Viens, et vois », parce que le discernement chez nous se fait dans le réel de la vie. Donc, la condition pour être moine, c’est de venir sans condition. Je crois que c’est très juste et très beau !

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